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Parution en septembre 2020
Un chantier mené par le CIRCEFT-ESCOL, avec le soutien financier du CUIP
Un travail d’inventaire et de collecte d’archives de la politique d’éducation prioritaire a été entrepris fin 2014 par deux chercheurs du laboratoire CIRCEFT-ESCOL de l’université Paris 8, Lydie Heurdier (chercheuse associée) et Jean-Yves Rochex (professeur des universités). Initié en partenariat avec le Département Éducation, Culture et Affaires sociales (DECAS) des Archives nationales (AN), son lancement a été marqué par la tenue d’une Journée d’études 35 ans d’éducation prioritaire : histoire(s) et mémoires(s), qui s’est tenue le 1er juillet 2016 sur le site des AN[1]. Il bénéficie, depuis 2017, d’un financement du Comité universitaire d’information pédagogique (CUIP, association loi 1901).
La création des zones prioritaires par Alain Savary dès son arrivée au ministère en 1981 a été, en France, la première politique éducative territoriale. Elle était pensée comme un laboratoire pédagogique afin de lutter contre l’échec scolaire massif des élèves issus des milieux populaires, dans un contexte de mise en place progressive de la décentralisation.
Source de nombreuses innovations pédagogiques, objet de nombreux débats, cette politique, fortement décentralisée au moins jusqu’à 2006, souffre pourtant d’un manque de mémoire institutionnelle. Ce manque, dommageable aux plans politique, administratif, pédagogique et scientifique, nous a conduit à tenter de recenser tous les fonds relatifs à la politique française d’éducation prioritaire, à susciter le versement des fonds publics existant dans les rectorats, inspections académiques, inspections du premier degré ou établissements, ainsi que de possibles fonds privés, puis à élaborer, en collaboration avec les Archives nationales un Guide des sources de l’éducation prioritaire en France numérique, évolutif et librement accessible en ligne[2]. Cette entreprise a également fait l’objet d’une circulaire du Service interministériel des Archives de France (SIAF) envoyée à tout le réseau des Archives départementales (AD), comportant de nombreuses annexes visant à servir d’appui aux services d’AD souhaitant collecter les archives relatives à l’éducation prioritaire dans leurs ressorts[3].
Outre l’élaboration du Guide des sources et le versement de fonds privés aux Archives nationales, le travail, mené pour l’essentiel par Lydie Heurdier, a permis l’inventaire et le versement de nombreux documents, en version papier ou numérique, aux Archives départementales d’une quarantaine de départements et dans les services d’archives de certains Rectorats. Peuvent également être consultées, sur cette politique d’éducation prioritaire, les Archives de la CFDT ou celles du Centre Alain Savary, créé en 1993 au sein de l’Institut national de Recherche pédagogique (INRP), devenu Institut français de l’éducation rattaché à l’ENS de Lyon. Ont également été collectées des Archives orales auprès de 23 « acteurs historiques » ayant joué un rôle important pour la politique d’éducation prioritaire, aux niveaux national, académique ou local, témoignages permettant d’éclairer non seulement l’élaboration et le pilotage de cette politique au niveau ministériel ou intéreministériel, mais aussi sa déclinaison et sa mise en œuvre régionales, départementales ou au sein des zones ou réseaux d’éducation prioritaire. Ces archives orales ont été déposées et sont consultables auprès des AD de Seine-Saint-Denis (versement 3320 W).
La recherche, mais aussi le débat public, peuvent ainsi s’appuyer sur des sources fiables et pérennes pour comparer, dresser des évolutions, mettre en évidence les ruptures et les continuités, relier cette politique éducative avec d’autres politiques publiques, nationales ou locales. Le chantier est vaste, car si depuis 1999, en moyenne, près de 20% des écoliers et des collégiens français relèvent de l’éducation prioritaire, certaines villes sont intégralement classées. Au-delà de la politique d’éducation prioritaire, c’est aussi l’histoire de la scolarisation d’une partie importante de la jeunesse qu’il s’agit de documenter. La mise à disposition de nouvelles sources, issues des territoires classés et des autorités déconcentrées, permet davantage d’études, tant en histoire, sociologie, science politique, géographie qu’en sciences de l’éducation. À terme, le débat public ou entre experts devrait être plus étayé et apaisé.
L’ensemble des informations sur ce travail, sur les ressources disponibles en ligne ou sur site, sur le plan de classement est disponible sur le carnet de recherche ARCHI-SHEP créé à cet effet sur le site hypotheses.org, à l’adresse suivante : https://archiveszep.hypotheses.org. On pourra également consulter l’article de Lydie Heurdier, « De nouvelles sources offertes aux chercheurs en sciences sociales : les archives de la politique d’éducation prioritaire », Histoire de l’éducation, n° 156, 2021, 215-226.
[1]. Cette journée d’études a donné lieu à la publication d’un dossier intitulé « L’éducation prioritaire, histoire(s) et enjeux pour demain », publié par la revue Diversité, n° 186, 2016.
[2]. Ce guide est accessible à l’adresse suivante : guide_sources_education_prioritaire_V02_2017-10
[3]. Cette circulaire est accessible à l’adresse suivante : https://francearchives.fr/fr/circulaire/DGPA_SIAF_2021_005